CS

L'influence des élus locaux n'a cessé de décliner depuis 1941. Le président du conseil d'administration, maire de la commune siège de l'établissement public de santé, a été dépossédé de ses pouvoirs d'administration et de gestion depuis 1941 au profit du directeur.

Loi du 7 août 1851Loi du 21 décembre 1941Ordonnance du 11 décembre 1958Loi du 31 décembre 1970
Nomination des personnelsPrésidence et commission amdinistrativeDirecteurDirecteurDirecteur
OrdonnancementPrésidence et commission administrativePrésidentDirecteurDirecteur
Représentation légalePrésidence et commission administrativePrésidentPrésidentDirecteur

Comme aurait pu le dire le général de Gaulle parlant du rôle des présidents de la IVème République, le président du conseil d'administration des hôpitaux "inaugure les chrysanthèmes". cela est quelque peu exagéré, car le conseil d'administration disposait, jusqu'à la loi HPST du 21 juillet 2009, de réels pouvoirs, même s'ils ont été réduits à l'essentiel, depuis la loi du 31 décembre 1970. Le nombre des attributions du conseil d'administration est passé ainsi de 14, avec la loi de 1970, à 16, voire 18 attributions, qui énumèrent les décisions stratégiques et de gestion fondamentales appartenant aux administrateurs et à leur président.

Le nombre des membres du conseil municipal de la commune siège de l'hôpital n'a cessé d'être réduit en pourcentage des membres du conseil d'administration, puisqu'il est passé:

- De 3 sur 7 en 1879 (42%);

- A 3 sur 9 en 1958 (33%) et 3 sur 12 dans les CHU (30%);

- A 3 sur 14 en 1970 (21%) et 4 sur 22 dans les CHU (18%);

- A 4 sur 23 en 1991 (17%) et 4 sur 32 dans les CHU (12,5%);

- A 3 sur 21 en 1996 (14%) et 4 sur 31 dans les CHU (13%).

L'arrivée d'élus provenant d'autres collectivités territoriales n'a pas modifié cette tendance au dépérissement de la représentation élective dans les conseils d'administration des hôpitaux si ce n'est de politiser le conseil d'administration des établissements oublics de santé au point que chaque tendance se neutralise face aux représentants des personnels médicaux et non médicaux qui sont en nombre croissant depuis leur introduction, par la loi du 31 décembre 1970, dans les conseils d'administration. En tenant compte des élus locaux provenant des autres coolectivités territoriales, nous avons les pourcentages suivants d'élus locaux dans les conseils d'adminsitration des CHR devenus CHU en 1958:

- 3 sur 7 en 1945 (42%);

- 3 sur 12 en 1958 (25%);

- 6 sur 22 en 1970 (27%);

- 8 sur 22 en 1996 (36%).

La question, dont tout le monde reconnaît l'acuité, porte sur la légitimité des élus locaux lorsqu'ils siègent dans les conseils d'administration des hôpitaux alorsq ue depuis 1941, et surtout depuis la création de la Sécurité sociale par l'ordonnance du 4 octobre 1945, les communes ne subventionnent plus les établissements de soins publics qui sont implantés sur leur territoire. Le maintien des élus locaux est alors motivé parce qu'ils représenteraient les patients, or ceux-ci sont désormais représentés ès qualité depuis l'ordonnance hospitalière du 24 avril 1996.

Les partisans de la suppression des élus locaux des conseils d'administration des établissements publics de santé argumentent sur l'élargissement de l'attractivité des établissements publics de santé du niveau communal au niveau extracommunal. La Commune et même la communauté de communes sont des territoires désormais trop réduits pour permettre la solidarité interhospitalière et surtout la reconfiguration entre les activités de soins des idfférents établissements de santé.

Ces arguments sont incontournablement recevables et pour beaucoup de ceux qui les avancent, le maire président du conseil d'administration de l'établissement public de santé n'a pas suffisamment mesuré les évolutions technologiques qui obligent cette recomposition territoriale, de l'offre de soins.

Les pouvoirs publics n'ont pas supprimé les élus locaux de la gouvernance hospitalière, mais les ont marginalisés en remplaçant le conseil d'administration par un conseil de surveillance qui donne désormais un pouvoir de contrôle sur les actes du directoire, alors qu'avant le conseil d'adminsitration avait un pouvoir de direction et de gestion.

Ainsi, les techniciens directeurs et médecins disposent du pouvoir de gérer et diriger l'établissement public de santé alors que les élus et autres représentants des personnels et des usagers ont un pouvoir de surveillance qu'ils partagent avec des représentants des médecins et des représentants des personnels ainsi que des représentants des personnalités qualifiées qui sont nommés par les représentants de l'Etat. N'est-ce pas l'effacement des élus au bénéfice des techniciens?

1- Composition du conseil de surveillance

La loi HPST donne au conseil de surveillance une compopsition proche de l'ancien conseil d'administration et lui octroie un pouvoir de contrôle tout en lui donnant la défintiion de la stratégie. Le législateur s'est efforcé de ménager les intérêt contradictoires et plus particulièrement la protestation des nombreux élus locaux mécontents de leur effacement, qui reste évident, puisque le maire n'est plus de droit le président du conseil de surveillance. Ce dernier, en effet, doit être élu parmi les membres du conseil de surveillance représentant soit les élus locaux, soit les personnalités qualifiées.

Selon la loi le conseil de surveillance est composé comme suit:

1° Au plus 5 représentants des collectivités territoiriales ou de leur groupement, désignent en leur sein par les organes délibérant des collectivités territoriales ou de leur groupement, parmi lesquels figure le maire de la commune siège de l'établissement principal ou son représentant et le président du conseil général ou son représentant;

2° Au plus 5 représentants du personnel médical et non médical de l'établissement public, dont un représentant élu parmi les membres de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-technique, les autres membres étant désignés à partité, respectivement par la commission médicale d'établissement et par les organisations syndicales les plus représentatives compte tenu des résultats obtenus lors des élections au comité technique d'établissement.

3° Au plus 5 personnalités qualifiées parmi lesquelles 2 sont désignées par le directeur général de l'agence de santé et 3, dont 2 représentants des usagers, sont désignées par le représentant de l'Etat dans les départements. Il est bien évident que le nombre de chacun des collèges doit être identique.

La loi prévoit des incompatibilités qui sont celles-ci; nul ne peut être membre d'un conseil de surveillance:

1° A plus d'un titre;

2° S'il encourt l'une des incapacités prévues par les articles L. 5 et L. 6 du Code électoral;

3° S'il est membre du directoire;

4° S'il apersonnellement ou par l'intermédiaire de son conjoint, des ses ascendants ou descendants en ligne directe, un intérêt direct ou indirect dans la gestion d'un établissement de santé privé; toutefois, cette incompatibilité n'est pas opposable aux représentants du personnel lorsqu'il s'agit d'établissement de santé privé qui assure, hors d'une zone géographique déterminée par décret, l'exécutiion d'une mission de service public;

5° S'il est lié à l'établissement par contrat.

Toutefois, cette incompatibilité n'est opposable ni aux personnes ayant conclu avec l'établissement un contrat de fournitures ou de prestations ou tout contrat dans lequel il pourrait y avoir un conflit d'intérêt;

6° S'il est agent salarié de l'établissement. Toutefois, l'incompatbilité résultant de la qualité d'agent salarié n'est pas opposable aux représentants du personnel médical, pharmaceutique et odontologique, ni aux représentants du personnel titulaire de la fonction publique hospitalière;

7° S'il exerce une autorité sur l'établissement en matière de tarification ou s'il est membre du conseil de surveillance de l'Agence nationale de santé.

On constate donc une diminution sensible du nombre des membres du conseil de surveillance par rapport au nombre des administrateurs des anciens conseils d'administration et on enregistre que le président du conseil de surveillance n'est plus de droit le maire de la commune d'implantation de l'établissement public de santé, mais est élu par les membres du conseil parmi les élus locaux ou parmi les personnalités qualifiées des uagers. C'est le déconnectage politique de l'établissement public de santé de sa collectivité territiriale d'implantation. C'est un point, semble-t-il important, qui renforce le passage de l'EPS dans la zone d'influence de l'Etat au détriment des collectivités territoriales.

Le directeur de l'agence régionale de santé assiste, avec voix consultative, aux séances du conseil de surveillance, cela peut lui permettre de mieux exercer sa tutelle sur l'établissement de santé car il connaîtra ainsi les débats que suscitent certaines des orientations prévues par le directoire et son président, qui est le directeur chef d'établissement.

Assistent également avec consultative:

- Le directeur de la Caisse d'assurance maladie, caisse pivot pour le versement de la T2A;

- Dans les CHU, le directeur de l'UFR ou le président du Comité de coordination de l'enseignement médical;

- Dans les établissements délivrant des soins de longue durée ou gérant en EHPAD, un représentant des familles des personnes accueillies;

- Le représentant de la structure chargée de la réflexion d'éthique lorsqu'elle existe.

Ce dernier est une nouveauté qui laisse augurer la création de comités locaux d'éthique dans de nombreux EPS.

2- Attributions du conseil de surveillance

Selon la loi du 21 juillet 2009, le conseil de surveillance dispose des compétences suivantes:

1° le conseil de surveillance se prononce sur la stratégie et exerce le contrôle permanent de la gestion de l'établissement;

2° Il délibère sur:

a) Le projet d'établissement

b) La convention constitutive des centres hospitaliers unibversitaires et d'autres conventions passées en application de l'article L. 6142-5,

c) Le compte financier d'affectation des résultats,

d) Toutes mesures relatives à la participation de l'établissement à une communauté hospitalière de territoire dès lors qu'un centre hospitalier universitaire est partie prenante ainsi que tous projets tendant à la fusion avec un ou plusieurs établissements publics de santé,

e) Le rapport annuel sur l'activité des établissements présenté par le directeur,

f) Toute convention intervenant entre l'établissement public de santé et l'un des membres de son directoire ou de son conseil de surveillance

g) Les statuts des fondations hospitalières créés par l'établissement;

3° Il donne son avis sur:

a) La politique d'amélioration continue de la qualités et de la sécurité des soins et de la gestion des risques ainsi que sur les conditions d'accueil et de prise en charge des usagers,

b) Les acquisitions, aliénations, échanges d'immeubles et leur affectation, le sbaux de plus de dix-huit ans, les baux emphytéotiques et les contrats de partenariat,

c) Le règlement intérieur d'établissement;

4° Le conseil de surveillance communique au directeur de l'agence régionale de santé ses observations sur le rapport annuel présenté par le directeur et sur la gestion de l'établissement, ce qui est incontestablement un moyen de fragiliser l'autorité du président du directoire vis-à-vis du directeur général de l'agence régionale de santé, qui rappelons-le, doit participer à la notation de ce directeur.

5° A tout moment le conseil de surveillance opère les vérifications et les contrôles qu'il juge opportun et peut faire communiquer les documents qu'il estime nécessaires à l'accomplissement de sa mission;

6° Si les comptes de l'établissement sont soumis à vérification, le conseil de surveillance nomme, le cas échéant, le commissaire aux comptes;

7° Le conseil de surveillance entend le directeur sur l'état des prévisions de recettes et de dépenses ainsi que sur le programme d'investissement.

Le législateur a voulu supprimer la bicéphalité de la gouvernance: président de conseil d'administration et directeur, au profit d'une direction unifiée sous forme d'un directoire. En contrepartie, le conseil d'administration s'efface et donne naissance à un conseil de surveillance dont les attributions de contrôle général de l'ensemble de l'organisation et du fonctionnement de l'établissement, et plus particulièrement sur les points essentiels, contribuent à la définition de la stratégie. Ce système sera t-il viable? On peut s'interroger sur les pouvoirs accordés au conseil de surveillance n'a pas la possibilité de se séparer du président du directoire comme cela se fait dans les structures des sociétés commerciales qui semblent avoir inspiré, mais vaguement, le législateur.

La fronde des élus locaux, qui a suscité la suppression du conseil d'administration, n'a pas réussi à modifier le projet gouvernemental de ne plus attribuer de droit aux maires la présidence du conseil de surveillance. Le président du conseil de surveillance est donc élu par le conseil parmi les représentants des élus locaux et des personnalités qualifiées, or ces dernières sont désignées soit par le directeur général de l'agence régionale de santé (2), soit par le représentant de l'Etat dans le département (3) si le quantum de cinq est retenu, et à due proportion si c'est un quantum inférieur à cinq. La difficulté tient à ce que les pouvoirs publics n'arrivent pas à assumer leur choix. Ils ont suivi deux logiques pour un seul choix! On retrouve cette ambivalence avec la bicéphalité du directoire, le directeur président et le président de la commission médicale d'établissement vice-président, alors que la majorité des membres du directeoire est composée de médecins!

Les pouvoirs publics devront-ils apprendre à choisir? La nouvelle loi HPST, dans volet "Réforme de l'hôpital", ne satisfaitt personne, cela est bien connu, mais ce qui nouveau c'est la forte protestation des élus locaux et plus particulièrement des maires des villes sièges d'un hôpital, et la non moins bruyante contestation des chefs de service de médecine, professeurs des universités et autres, qui ne veulent pas de l'autorité des directeurs. Que faire? L'exercice est difficile. D'un côté, la logique du service public hospitalier dont la légitimité réside dans le métier principal qui fonde l'activité de l'hôpital.

Dans la logique de srvice public, le maire ou le président de la communauté de communes, ou le président du conseil général, sont naturellement le smieux placés pour présider aux destinées de l'hôpital, fusse par la voix d'un conseil de surveillance.

Dans la logique entrepreneuriale, les médecins sont incontestablement les plus légitimes pour présider le conseil de surveillance. Que veut-on? Si l'on veut conserver, ce qui ne semble pas être le cas, le service public hospitalier exercé par les seuls établissements publics de santé il faut revenir à la logique des élus patrons des établissements.

Si l'on veut un hôpital entreprise, ce qui semble être la bonne hypothèse de la loi HPST, il faut aller jusqu'au bout de son choix et considérer que les médecins n'ont pas tort de revendiquer la présidence du conseil de surveillance. Evidemment, dans cette dernière variante les élus conserveront un rôle important dans le conseil de surveillance, mais ce sera un médecin parmi les actifs ou les retraités, le plus représentatif des ses collègues, et choisi pas forcément dans l'établissement concerné, qui présidera le conseil de surveillance, dont une des attributions sera de donner un avis conforme aux décisions du directeur dans son choix de nomination des médecins.

Ce n'est pas cette voie qui a été prise par le législateur, prisonnier des nombreux amendements et des difficultés de constituer une majorité pour le vote de la loi. Le législateur a essayé de concilier ce qui apparaît inconciliable, c'est à dire les intérêts des médecins d'un côté, le maintien d'un directeur administratif de l'autre, avec la possibilité pour un élu d'être nommé par ses pairs à la tête du conseil de surveillance. A notre sens, c'est une belle pagaille en perspective.