L’ethnomédecine : la part du droit – Aspects juridiques historiques et de droit interne
La tradimédecine, un savoir thérapeutique à la légitimité médicale niée – Il a existé des époques sans médecins, mais jamais sans médecine. Rares
pourtant sont les ouvrages sur la médecine qui daignent s’intéresser à la tradimédecine. Ceux qui l’évoquent la relèguent dans les limbes du passé, au motif que « l’ethnomédecine traditionnelle » serait « en train de disparaître sous les feux de la civilisation technique ». On peut ainsi citer la remarquable Histoire de la médecine, de C. Lichtenthaeler (1915-1993), un livre de référence de la fin du siècle dernier. L’ouvrage n’omet pas de consacrer d’amples développements à la « médecine archaïque » (d’avant Hippocrate), mais il ignore tout à fait le phénomène tradimédical, comme s’il était étranger à la médicalité. Celle-ci relèverait d’autre chose : à rebours de la rationalité scientifique, la tradimédecine serait liée à la pensée magique. Et la bibliographie sur les guérisseurs renvoievolontiers à celle qui existe sur le charlatanisme. Celui-ci existe, certes, mais il ne correspond pas à la réalité des médecines alternatives et complémentaires, parmi lesquelles la tradimédecine occupe une bonne place. Et le charlatanisme n’est pas à rechercher seulement dans le champ des « empiriques ». Car nombre de charlatans connus dans l’histoire étaient d’authentiques médecins, comme le docteur Dangerfield, pris à partie comme « faux guérisseur » à cause de son « rayon moléculaire » contre la tuberculose dans les années 1920. Au vu de la jurisprudence française la plus récente, de toute évidence, le charlatan – qui offre des alternatives thérapeutiques illusoires pour se procurer un avantage financier – peut être ou non un médecin capable d’exercer. Ce n’est pas l’absence de titre,
mais la manière de « soigner » qui caractérise le charlatan.
Certes, jusqu’à l’orée du XIXe siècle, les Européens ont volontiers regardé avec intérêt les savoirs thérapeutiques des populations périphériques. Mais une conjonction de facteurs, l’essor de la biomédecine moderne, mais aussi la suprématie technique de l’Occident et la naissance d’une idéologie coloniale convaincue par l’idée de suprématie blanche ont renversé la perspective.
Partie I – Le caractère protéiforme de la médecine traditionnelle hors de l’Occident Chapitre I. Les ethnomédecines populaires
Section I – Les ethnomédecines océaniennes : l’exemple de la tradimédecine kanak de Nouvelle-Calédonie § 1 – Une tradithérapie interdite par le droit français et enveloppée d’un voile de secret par la coutume kanak
a) Les raisons de l’hostilité du droit français
b) Les causes du voile de secret qu’entretient la coutume kanak § 2 – La nécessité pour sortir du blocage de faire évoluer le droit français et la coutume kanak
a) L’utilité de faire progresser le droit français vers la liberté des soins
b) Le besoin de rénover la coutume au service de la collectivité Section II – Les ethnomédecines africaines § 1 – Une tradimédecine liée à la magie et au sacré § 2 – La singularité de la medsinn morisien
Chapitre II. Les tradimédecines savantes Section I – La Chine et la MTC (zhōngyī, 中医 littéralement « médecine chinoise »)
Section II – Le Vietnam : « médecine du Nord » (ThuốcBắc ou MTC vietnamienne savante) et « médecine du Sud » (Thuốc Nam ou MT vietnamienne savante)
Section III – La Corée : hyangyak (향약 en hangul et 鄕約 en hanja)
Section IV – Le Japon et la Kampo Medicine Section V – Le Tibet et la sowa-Rigpa étroitement connectée à la religion bouddhiste
Section VI – L’Inde et son pluralisme tradimédical (âyurveda, siddha, yunani medicine, sowa-rigpa) § 1 – La diversité des traditions tradimédicales, tempérée par la prééminence de l’âyurveda § 2 – Un système tendant à rapprocher la médecine indienne des médecines d’origine occidentale et les tradicaments des médicaments
a) Les praticiens
b) Les tradicaments
Partie II – L’adaptation de la médecine traditionnelle aux différents droits nationaux. Essai de synthèse Chapitre I. Typologie des régimes : les systèmes exclusiviste et intégratif, semi-intégratif et inclusif simple Section I – La distinction des systèmes exclusivistes et des systèmes intégratifs
Section II – Les systèmes mixtes : systèmes semi-intégratifs et systèmes inclusifs simples
Chapitre II. La typologie des acteurs et des instruments Section I – Le statut des tradipraticiens
Section II – Le statut des tradicaments