Défaut d'information et aléa thérapeutique : vers la redéfinition des rapports entre responsabilité médicale et solidarité nationale
La création d'un droit à indemnisation des victimes d'accidents médicaux, d'affections iatrogènes ou d'infections nosocomiales, fondé sur la solidarité nationale est certainement l'une des innovations majeures de la loi du 4 mars 2002 (dite " loi Kouchner "). Toutefois, ce système novateur a longtemps présenté des imperfections : en vertu d'une jurisprudence constante, la victime d'un tel accident ne pouvait faire valoir sa créance à l'encontre de l'ONIAM, organisme payeur institué par la loi, qu'en l'absence de toute faute médicale, qu'elle soit de nature technique (faute commise à l'occasion du diagnostic, du traitement ou des soins) ou de nature éthique (défaut d'information préalable à l'acte litigieux). A défaut, elle devait se retourner contre le professionnel ou l'établissement de santé responsable - sans, hélas, pouvoir prétendre à l'entière réparation de ses préjudices, en particulier dans l'hypothèse d'un défaut d'information, lequel n'est traditionnellement sanctionné par le juge qu'autant qu'il en est résulté pour le patient une perte de chance de refuser l'acte litigieux et d'échapper, par ce biais, à un risque de maladie ou d'infirmité. Désireuse de renforcer les droits des usagers du système de santé, la Cour de cassation a cherché à mettre fin à ce paradoxe dans un arrêt dont le présent article analyse les fondements, l'objet et les possibles implications.
I. – LA DISSOCIATION DES FAITS GÉNÉRATEURS DE RESPONSABILITÉ MÉDICALE ET LE DÉCOUPLAGE DES PRÉJUDICES SUBIS : UNE SOLUTION THÉORIQUEMENT OPPORTUNE
II. – LA DÉCOMPOSITION DE L’INDEMNISATION : UNE SOLUTION D’APPLICATION DÉLICATE