Les nouvelles frontières du corps

Résumé

Les sujets dans l’air du temps ont un intérêt : ils permettent d’attirer l’attention du lecteur et, pour peu que le message bouscule les idées convenues, il ouvre à la réflexion. Nous faisons une tentative avec « le corps » tout en reconnaissant que dans ce rapprochement entre corps et droit, le vrai sujet de notre étude, c’est le droit. Dans notre société schizophrène, révoltée contre la contrainte des normes mais appelant à la fabrication de toujours plus de normes juridiques, le droit, même positif, n’est plus ni intelligible ni cohérent. Il est complexe et pluriel. Partant du constat que le droit a aujourd’hui institué le corps comme un sujet juridique à part entière, peut-on espérer que cette « juridicité » du corps nous révèle le droit tel qu’il est ou tel que nous voudrions qu’il soit ? Il faudra nous rappeler que le corps et le droit ont une longue histoire commune qui, pareille à celle d’un vieux couple, est faite de sentiments et d’intérêts. Aujourd’hui, leur rapport est essentiel à la compréhension de notre monde car « la modernité a élaboré le corps comme une borne frontière pour distinguer chaque individu » des autres comme du collectif. Ce faisant, le corps emporte le droit dans une dynamique juridique, sociale et politique. Le corps est partout, sous toutes formes, matérielle et virtuelle, subjective et objective, démembré et recomposé. Il nous fait entrer dans l’ère postmoderne, celle du corps triomphant. Mais, ce phénomène de socialisation du corps nous dit bien d’autres choses, notamment sur la fonction sociale du droit. Le paradoxe du corps – il est ce par quoi l’individu est et ce qui le relie au monde – nous révèle, en effet, la pérennité de cette fonction : relier le singulier au tout et tendre à l’universel.

Mots-clés

Droit – Corps – Identité individuelle – Frontière – Dynamique – Ambiguïtés

Abstract

The subjects in the tune of time have an interest : they attract the attention of the reader and, if the message upsets the agreed ideas a little, it can open to reflection. We thus make here an attempt with « the body » while recognizing that in this rapprochement between body and law, the real subject of our study is the law. In our schizophrenic society, revolted against the constraint of norms but calling for the manufacture of ever more legal norms, law, even positive, is no longer intelligible or coherent. It is complex and plural. Starting from the observation that law has now instituted the body as a legal subject in its own right, can we hope that this « juridicity » of the body reveals to us the law as it is or as we would like it to be ? We must remember ourselves that the body and the law have a long common history which, like that of an old couple, is made up of feelings and interests. Today, their relationship is essential to the understanding of our world because « modernity has elaborated the body as a boundary marker to distinguish each individual » from others as from the collective. In so doing, the body carries the law in a legal, social and political dynamic. The body is everywhere, in every form, material and virtual, subjective and objective, dismembered and recomposed. It brings us into the post-modern era, that of the triumphant body. But this phenomenon of socialization of the body tells us many other things, notably on the social function of law. The paradox of the body-it

is that by which the individual is and that which connects him to the world-reveals to us, in fact, the perenniality of this function : to link the singular to the whole and to tend towards the universal.

Keywords

Law – Body – Idividual identity – Frontier – Dynamic – Ambiguity